Résumé :
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Alors que l’approche sérielle psycho-criminologique est expérimentée au sein de l’Administration Pénitentiaire française, il convient de présenter brièvement cette approche, ses théories, modèles et pratiques, ainsi que sa place encore inexistante aux cotés des géants internationaux que sont les modèles réhabilitatifs 'Risque-Besoins-Réceptivité' (Bonta et Andrews, 2007) et 'Good Lives Model' (Ward et Gannon, 2006). Notre réflexion s’illustre en trois brèves : (i) la situation de l’analyse psycho-criminologique française, (ii) la concrétisation de l’analyse psycho-criminologique française via l’approche bioscopique sérielle, et (iii) le lien entre l’analyse psycho-criminologique française et les principaux modèles réhabilitatifs internationaux. En premier lieu, l’approche psycho-criminologique sérielle française déplace le focus d’analyse vers l’étude des dynamiques situationnelles plutôt que l’étude de la trajectoire d’existence sur un plan chronologique et monographique (Villerbu et al., 2009 ; LeBas, 2011). La psycho-criminologie (dynamique) ici se propose comme une science des situations psychiques et de leurs aménagements (Hirschelmann, 2013). L’acte ne serait donc pas une rupture existentielle, mais un marqueur subjectif de la vie du sujet. En second lieu, la psycho-criminologique française trouve une méthodologie pratique dans l’approche bioscopique sérielle. Le concept de 'sérialité' de l’investigation psycho-criminalistique (Ressler et al., 1986 ; Douglas et al., 1992) est repensé dans une approche dynamique des trajectoires criminelles et des typicités infractionnelles qui amènent à interroger tout ce qui fait répétition dans le parcours de vie du sujet (Le Bas, 2011). Sur le plan méthodologique et par analogies rétrospectives et prospective, il convient d’analyser à travers les divers parcours du sujet (familial et conjugal, scolaire et professionnel, sanitaire, judiciaire, institutionnel, d’insertion et de probation, et possiblement sa sexualité et ses loisirs) ce qui amène à des répétitions, similarités, substitutions et cyclicités. Si des familiarités se retrouvent tant avec l’analyse des trajectoires de De Greeff (1956) que le concept de la 'storyligne' (ou 'lignes d’événement') d’Agnew (1991, 2006), l’analyse bioscopico-sérielle combine les facteurs endogènes du sujet (émotionnels, sensoriels, cognitifs, mémoriels) et les facteurs exogènes liés à l’environnement (situationnels, relationnels, sociaux) depuis le positionnement subjectif et interprétatif du sujet en action. Deux axes organisent l’agencement des informations (Hirschelmann, 2016), la dimension temporelle et la dimension spatiale (e.g. Famille, Travail, Judiciaire) du parcours du sujet. L’analyse des données vise à lier et retracer, dans ce qui fait événement, les aléas significatifs ayant ponctué la vie du sujet pour amener celui-ci à travailler sur ses forces et vulnérabilités. En troisième lieu, si l’approche psycho-criminologique sérielle française démontre un intérêt dans l’analyse de divers champs infractionnels (Hirschelmann, 2013), celle-ci est encore difficilement saisissable, manque d’outils concrets et généralisables. Surtout, elle ne semble pas exister et interroger au regard des principaux modèles réhabilitatifs internationaux que sont le modèle 'Risque-Besoins-Réceptivité' (Bonta et Andrews, 2007) et le 'Good Lives Model' (Ward et Gannon, 2006) qui se réfèrent tous deux aux théories et pratiques des thérapies comportementales, cognitives et émotionnelles (Cottraux, 2011). [résumé d'auteur]
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