Résumé :
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Peu d'études d'épidémiologie clinique sur la phobie sociale ont été réalisées en France. Il s'agit pourtant d'une pathologie fréquente, s'accompagnant d'une altération souvent franche de l'adaptation sociale et de la qualité de vie, et pour laquelle des traitements efficaces existent. Notre étude a porté sur un échantillon de 952 patients suivis ou hospitalisés en psychiatrie pour un diagnostic principal de phobie sociale d'après les critères du DSM IV. Différentes évaluations diagnostiques et psychométriques ont été effectuées, afin d'explorer la comorbidité, l'intensité du trouble, et différents aspects du retentissement fonctionnel et émotionnel. Les patients inclus sont en majorité des femmes (57,6 %), leur moyenne d'âge s'élève à 37,5 ans, et leur phobie sociale évolue en moyenne depuis 12,5 années. Les niveaux d'anxiété sociale à l'échelle de Liebowitz s'élèvent à 40,3 + 12,6 pour le score de peur et à 38,3 +13,6 pour le score d'évitement. Il s'agit de formes généralisées dans 67,8 % des cas. Un épisode dépressif majeur est retrouvé associé à la phobie sociale dans près de la moitié des cas, et la prévalence de l'agoraphobie est également élevée. Un antécédent de tentative de suicide est retrouvé chez 15,4 % des patients, et le risque suicidaire est considéré comme présent chez près de 40 %. Le retentissement psychosocial et en terme de qualité de vie est important, que ce soit dans les domaines familiaux, professionnels ou de loisirs. En plus de la sévérité de l'anxiété sociale, la symptomatologie dépressive rentre, pour une part importante, dans la gêne ressentie. Environ 60 % des patients bénéficiaient déjà d'une prise en charge psychiatrique au moment de l'enquête, mais seulement 17 % avec une thérapie comportementale et cognitive et 48 % avec un antidépresseur. Ces proportions augmentent de manière sensible après la consultation au cours de laquelle l'enquête a été réalisée. Au total, cette étude permet surtout d'insister sur la sévérité et la morbidité de la phobie sociale dans ce très large échantillon de patients français. Les troubles dépressifs, les risques suicidaires, et les indices de retentissement constituent autant de facteurs incitant à un dépistage large et précis de cette affection. Au vu des durées moyennes d'évolution, il paraît clair que le dépistage et le traitement de la phobie sociale doivent être optimisés, et le rôle des psychiatres dans ce processus apparaît très important.[résumé d'auteur]
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