Résumé :
|
Les rapports historiques entre la phénoménologie génétique husserlienne et la psychiatrie phénoménologique, issue de Binswanger, ont été récemment actualisés. Une philosophie du corps y prend tout son sens, fondée sur la distinction entre Leib et Körper. La chair devient le point source d'une genèse, de l'expérience an-égoïque, par lesquelles la subjectivité et l'intersubjectivité se constitueront. Les études phénoménologiques contemporaines (É. Escoubas, N. Depraz, M. Richir), centrées sur la phénoménologie génétique, autorisent une relecture de Binswanger en accord avec les recherches psychiatriques (W. Blankenburg, A. Tatossian). La clinique montre comment l'expérience de la chair s'exprime dans l'expérience délirante, comme si les psychoses réalisaient empiriquement une mise à nu des structures transcendantales en voie de constitution ou de dissolution. Les synthèses passives d'ordre temporel, en deçà de la distinction sujetobjet, émergent à travers les défaillances. Une analyse différentielle entre la philosophie phénoménologique et la psychiatrie est alors possible. La description phénoménologique suppose une méthode réflexive opérant une réduction de l'expérience naturelle ; la description clinique tente de saisir les phénomènes psychotiques comme une expérience de la nature, selon l'expression de Binswanger. Cette double perspective confirme le primat d'une dimension anthropologique. La question du corps, telle que la pose la psychiatrie phénoménologique, se développe en fonction d'un continuum signifiant où s'intègrent les variations entre la biologie, la psychologie et l'anthropologie. La phénoménologie assume et prend en charge cette complexité.[résumé d'auteur]
|