Résumé :
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Introduction - Si la rémission de la dépression est l'objectif thérapeutique principal (absence de critères cliniques du trouble et scores bas aux échelles d'évaluation), la fréquence de rémissions partielles reste élevée (critères non suffisants pour diagnostiquer le trouble, mais persistance de symptômes évaluables cliniquement et psychométriquement). La présence de symptômes résiduels est associée à un taux de rechutes dépressives plus élevé, jusqu'à 5 fois plus rapidement que chez les sujets en rémission sans symptômes résiduels, à une augmentation du taux de suicides, une consommation de soins importante et un handicap social prononcé. Les symptômes les plus fréquemment rapportés sont propres à la dépression : l'anxiété et l'irritabilité, l'humeur dépressive, la culpabilité et la perte des centres d'intérêt, l'asthénie et les troubles du sommeil du début de la nuit. On considère que les symptômes résiduels constituent un marqueur clinique valide et fiable pour le pronostic (surtout en termes de rechute et chronicité) et doivent faire l'objet de stratégies thérapeutiques spécifiques. Les études sur la dépression avec symptômes résiduels restent peu nombreuses et concernent surtout des populations de patients hospitalisés ou à forme sévère de dépression. Peu de travaux ont porté sur les patients suivis en ambulatoire, il nous a paru pertinent de sélectionner une population de patients déprimés dans une consultation de psychiatrie libérale. Notre objectif principal était d'analyser la fréquence des symptômes résiduels après 8 à 12 semaines de traitement antidépresseur et d'étudier les caractéristiques cliniques et sociodémographiques de ces sujets. Méthode - 1 790 patients ayant présenté un épisode dépressif majeur selon les critères du DSM IV, sous traitement antidépresseur depuis 8 à 12 semaines, ont été inclus et évalués. 463 psychiatres libéraux exerçant en France métropolitaine ont été sélectionnés par tirage au sort avec stratification selon les régions et le sex ratio (30 % de femmes et 70 % d'hommes) pour obtenir un échantillon le plus représentatif de la population des psychiatres français. Ont été mesurés et évalués les caractéristiques anthropométriques et sociodémographiques, antécédents de dépression, description du dernier épisode dépressif majeur, description de sa prise en charge, variables cliniques actuelles, score à l'échelle de dépression de Hamilton (HDRS), évaluation des symptômes résiduels par le médecin, description de la prise en charge du patient le jour de la consultation. Résultats - Après le traitement d'attaque, l'évaluation de la symptomatologie dépressive sur l'échelle de Hamilton rapporte que 549 sujets (32 %) ont un score inférieur à 8, 792 patients (46,7 %) ont un score entre 8 et 18 et 354 sujets (20 %) ont un score supérieur à 18. Les patients du premier groupe (HDRS > 8) considérés en rémission ont un début de traitement précoce c2 = 18,28, ddl = 4, p 18) présentait plus d'antécédents dépressifs ( c2 = 17,04, ddl = 4, p
intérêt pour les activités et le travail (49,4 %). Les indices de dépression sévère (insomnie matinale, ralentissement, agitation, hypochondrie, perte de poids et manque de conscience du trouble) sont des items moins rapportés voire le plus souvent absents. Conclusion - Trois points importants se dégagent de ces résultats. Premièrement, une partie importante (46,7 %) de patients ayant répondu au traitement après la période d'attaque présente une symptomatologie résiduelle. Deuxièmement, ces symptômes font partie du pôle « humeur triste - anxiété psychique ». Troisièmement, le délai d'instauration du traitement semble avoir un effet sur la nature de la réponse. Ces résultats confirment la nécessité de développer des stratégies de dépistage de ces formes résiduelles et des traitements spécifiques.[résumé d'auteur]
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