Résumé :
|
La dépression récurrente, parce qu'elle connaît une prévalence importante dans la population et qu'elle est une pathologie à risque de conduites suicidaires (CS) élevé, est une cible majeure des stratégies médicales de prévention du suicide. Rappelons qu'en France chaque année, près de 11 000 personnes décèdent de suicide et que l'on compte 200 000 tentatives de suicide. Une étude récente nous informe que le risque attribuable de CS en population attaché au temps passé déprimé est de 78%. Ainsi, le risque de CS dans la dépression récurrente étant associé à la sévérité des épisodes, la réponse partielle au traitement, la chronicité et aux récurrences, les exigences du traitement antidépresseur seront élevées. L'évaluation du risque doit envisager les comorbidités psychiatriques qui facilitent le passage à l'acte, notamment les abus d'alcool, mais aussi le manque de soutien social. La reconceptualisation actuelle des CS permet de les considérer comme une pathologie à part entière. Aussi, l'évaluation devra porter sur la vulnérabilité suicidaire spécifique : histoire personnelle et familiale de CS, propension au désespoir et impulsivité agressive, et histoire de maltraitance infantile. L'existence d'une telle vulnérabilité permet de détecter les patients à très haut risque suicidaire pour mettre en oeuvre les protections nécessaires. Les progrès liés à l'apport des neurosciences permettent d'envisager une meilleure compréhension de la physiopathologie suicidaire. Fort de cette évaluation multifocale, le clinicien aura identifié des cibles thérapeutiques potentielles. La priorité sera le traitement adéquat de la dépression, tant il est clair que trop de patients déprimés n'ont pas la chance d'y accéder. Il faudra ensuite être prêt à déployer l'ensemble des stratégies disponibles pour atteindre la meilleure rémission possible. Les comorbidités devront faire l'objet d'une prise en charge adaptée. Il en est ainsi de la comorbidité suicidaire qui pourra justifier d'associer des traitements spécifiques, qu'il s'agisse des sels de lithium (utilisation hors AMM) ou de psychothérapies ciblées. Enfin, les innovations dans l'organisation des soins auront pour but de maintenir le lien avec des sujets en difficulté, afin d'éviter le passage à l'acte. [résumé d'auteur]
|