Résumé :
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L'évaluation des processus d'inhibition a une place centrale en neuropsychologie comme en psychopathologie. De nombreux praticiens et chercheurs tiennent pour acquis qu'un déficit d'inhibition peut être évoqué pour rendre compte des performances lors du vieillissement normal et pathologique. Si les fonctions essentielles remplies par les mécanismes inhibiteurs sont largement détaillées dans la littérature, la nature précise des processus sous-jacents mis en jeu demeure peu abordée. À ce propos, dans un article de 1997, Burke [4] met en exergue l'urgence de se concentrer sur une spécification de la théorie de l'inhibition qui demeure à ce jour vague et intuitive. Autrement dit, les phénomènes inhibiteurs observés sur les performances (ie ralentissement des temps de réponse) ne sont pas interprétables de façon univoque par l'existence de processus cognitifs inhibiteurs centraux. Ceci est d'autant plus vrai dans le contexte de l'amorçage négatif, paradigme couramment employé lors de protocoles hospitaliers de recherche clinique (notamment en neuropsychologie et psychopathologie). Selon l'interprétation dorso-ventrale de l'amorçage négatif, il existe 2 processus d'inhibition indépendants, l'un basé sur la localisation, l'autre sur l'identité des informations. Néanmoins, la question de la multiplicité des fonctions inhibitrices et de la validité psychologique de l'inhibition comme processus organisateur de la pensée demeure à ce jour source d'oppositions. Pour notre part, nous proposons qu'une approche de l'inhibition en termes de niveaux de traitement autorise une compréhension unitaire et automatique de cette dernière. Nous défendons ainsi l'hypothèse frontale de l'amorçage négatif selon laquelle la capacité à inhiber dépend des capacités de contrôle et de maintien des objectifs des individus. Dans ce but, nous avons réalisé 2 expériences à partir d'une version modifiée du paradigme d'amorçage négatif associé à une tâche de catégorisation sur le genre. Nous montrons que la compatibilité des couples amorce/cible donne lieu à un ralentissement des temps de décision comparativement à une condition incompatible. Nous appelons ce ralentissement Effet de compatibilité négative (NCE) que nous interprétons comme étant un indicateur de la mise en œuvre d'un mécanisme d'inhibition automatique. Le profil des performances entre jeunes et âgés ne diffère pas dès lors que la tâche nécessite peu d'attention contrôlée (expérience 1). En revanche, les personnes âgées ne présentent pas de NCE dès lors que la tâche est complexe (expérience 2). Notre travail suggère qu'il est essentiel de prendre en compte la capacité générale des sujets, notamment leur capacité à maintenir les buts en cours, lorsque nous postulons qu'il existe un déficit d'inhibition lors du vieillissement. Nous discutons de ces résultats au regard de la théorie des niveaux de traitement et des données récentes issues de la neuro-imagerie.[résumé d'auteur]
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